Autant le dire tout de suite, je me force un peu pour aborder le sujet. L’élection présidentielle est selon moi celle qui mérite le plus le fameux slogan « élection, piège à cons » et cela se vérifie mille fois cette année. Toutefois, outre le fait qu’une prise de position de ma part brise un peu la somnolence de ce blog, il me semble qu’un élu local se doit de se mouiller un peu à propos du vote national qui approche. Ainsi, vous avez pu voir le président du Conseil départemental, Hugues Saury, s’engager d’abord en faveur de Nicolas Sarkozy, puis soutenir logiquement François Fillon après la primaire, puis ne plus vouloir de François Fillon lorsqu’il devint évident que celui-ci n’a pas les qualités morales requises pour la fonction, … puis à nouveau soutenir François Fillon lorsqu’il devint évident qu’il serait tout de même le candidat de la droite. En m’exprimant tardivement, je ne m’expose pas à de telles pirouettes. Mais à vrai dire ma position est connue de longue date car elle n’est pas très originale : je soutiens Benoît Hamon.
Mes arguments sont extrêmement simples :
* La conviction : Benoît Hamon défend le projet le plus conforme aux ambitions écologistes et libertaires qui m’animent ;
* La raison : Benoît Hamon n’est pas la personnalité idéale puisque celle-ci n’existe pas, mais au moins il ne traîne pas les mêmes bruyantes casseroles que certain.e.s autres ;
* La loyauté : Benoît Hamon est le candidat choisi par les mêmes qui m’ont mené au poste de conseiller départemental en vertu duquel mon avis sur l’élection présidentielle peut avoir quelque écho.
Pour ce qui est des convictions, vous connaissez les miennes : il est urgent de changer le modèle de développement de notre société. Pour ne parler que de la France, de nombreux citoyens l’ont déjà fait, certains à un degré très avancé. Des collectivités locales, des associations, des entreprises sont également en train de prendre le tournant de la transition écologique. Il faut maintenant une plus forte impulsion nationale. Or, il m’apparaît évident que le projet présidentiel de Benoît Hamon est le seul qui propose une évolution radicale de notre rapport aux ressources naturelles, aux liens sociaux et au travail. Et cela sans dissocier la lutte contre les inégalités de la défense des libertés individuelles qui constituent deux des piliers de notre République.
Pour ce qui est de la loyauté, on pourrait sans doute confronter, à l’instar de Manuel Valls, la fidélité aux idées et la fidélité aux engagements. On pourrait aussi, à l’instar de certains écologistes, se rallier à un supposé « vote utile » en faveur d’un candidat mieux placé que l’on s’évertuera à parer de vertus écolos. Ce n’est pas ainsi que je l’entends. Au moment où nombre de nos concitoyens doutent fortement de la politique et des politiciens, je suis convaincu que nous devons leur envoyer des preuves de cohérence et de respect de la parole donnée. Or, dans le courant de pensée auquel j’appartiens, des majorités claires se sont exprimées pour désigner d’un côté Yannick Jadot et de l’autre Benoît Hamon. C’est tout aussi clairement que les écologistes ont opté pour une convergence de ces deux candidatures sous la bannière de Benoît Hamon. En tant que citoyen, je pourrai bien faire tout ce qui me plaira une fois dans l’isoloir. Mais en tant qu’élu, porteur de la parole de tous ces militants, je ne suis qu’à leur service. Le choix de la gauche et des écologistes, c’est Benoît Hamon.
Enfin, je ne peux conclure sans évoquer mon sentiment de profonde perplexité face à cette élection présidentielle à la fois si dérisoire et cruciale. Elle a toujours pesé très fortement sur l’indépendance du Parlement et c’est particulièrement vrai depuis que les élections législatives ont été placées au lendemain de la présidentielle. C’est ainsi que, en parallèle à la défiance croissante des citoyens envers les acteurs politiques se développe une forme de magie selon laquelle il suffirait d’élire une seule fois la bonne personne pour que tout soit résolu. Le sens politique de l’élection s’efface ainsi devant l’espoir irrationnel que suscite telle ou telle personnalité supposée hors du commun. Voilà pourquoi il me semble que le piège de l’élection n’a jamais été aussi gros que cette fois-ci. Les gens n’y croient plus mais ils vont quand même faire un « pari » sur l’avenir, une forme de loterie qui n’appelle que des déceptions. Pourtant, contrairement au slogan dont j’ai fait mon titre, les Français ne sont certainement pas des « cons ». Il y a peu de dupes qui croient vraiment qu’il suffit de voter tous les 5 ans pour régler les problèmes. Restera à trouver, à partir du 8 mai, les arguments pour que les citoyen.ne.s, non seulement accordent un peu d’intérêt au choix de leurs député.e.s, mais aussi continuent de demander des comptes et de s’emparer de leur pouvoir d’agir, chaque jour et en tous lieux.
Thierry Soler, Conseiller départemental du Loiret
Article paru initialement sur le blog de Thierry Soler