La balade climat, une initiative appréciée

Dans le cadre de la campagne « Climat » d’Europe Écologie Les Verts Ouest-Loiret, nous avons parcouru les bords de Loire à Orléans samedi dernier 7 novembre. Avec une quinzaine de participants, deux journalistes et plusieurs intervenants, par un après-midi quasiment estival, cette promenade pédestre fut l’occasion de présenter quelques aspects locaux du dérèglement climatique global. Avant de se retrouver le 29 novembre à Paris pour une « marche » porteuse de revendications envers la conférence COP21, notre petite balade, moment de détente et de réflexion, a rassemblé diverses expertises que nous voulons partager ici … en attendant de renouveler l’expérience.

le groupe en marche

Le climat de la région Centre s’est déjà transformé

Thierry Soler, porte-parole local de notre parti, proposa en introduction les données climatiques de la région rassemblées notamment par Météo-France pour un forum organisé en 2012. A l’échelle mondiale, l’augmentation des gaz à effets de serre dans l’atmosphère entraîne une élévation de la température moyenne à la surface de la terre, une montée du niveau des mers et des dérèglements variés dans la répartition des pluies selon les pays et les saisons. Dans la région Centre, la température moyenne s’est déjà accrue de près d’un degré depuis le début de l’ère industrielle. C’est surtout notable pour la moyenne des températures minimales relevées tout au long de l’année (en général, c’est la température au lever du jour). Entre 1881 et 2000, cette moyenne est montée de 1,8°C et l’on peut penser que les gelées se font plus rares. On note également que les pluies sont stables en moyenne annuelle mais qu’elles diminuent fortement au printemps et en été. On peut s’attendre à ce que ces phénomènes s’accentuent et que notre région subisse plus souvent des sécheresses et des épisodes de canicule comme ce fut le cas cet année quoique sans gravité.

Nous pouvons nous y adapter en modifiant notre habitat

BoulnoisJacques Boulnois, architecte du cabinet HBPR d’Orléans, nous présenta ensuite la maison de l’architecture, le lieu d’où nous venions de démarrer la balade pour nous placer au ras de l’eau du fleuve, toujours quai Saint-Laurent. L’architecture permet de prendre en compte le changement climatique en construisant des bâtiments à la fois économes en énergie et en ressources, assurant un confort aussi bien en hiver (une saison plus courte à l’avenir mais pas forcément moins froide) qu’en été (là, il faut s’attendre à des chaleurs plus pénibles). En combinant l’isolation thermique, les apports du soleil et la ventilation, on peut envisager des habitations qui n’auront pas à consommer d’énergie pour garder une température intérieure agréable. La maison « passive » sera le standard pour le neuf à partir de 2020. Il sera plus compliqué et néanmoins indispensable de rénover les constructions anciennes qui resteront habitées pendant des décennies. Jacques Boulnois attira notre attention sur ce que l’on appelle l’énergie « grise », autrement dit le fait qu’il ne faut pas s’emballer pour des matériaux dont la fabrication nécessite plus d’énergie au départ que la quantité qu’il permettront d’économiser par la suite dans l’habitat. La question se pose encore pour les panneaux photovoltaïques dont la seule fabrication consomme autant d’énergie que celle que ces panneaux fourniront pendant des années de fonctionnement. Cette énergie grise n’est « remboursée » que si les produits ainsi fabriqués restent en état de marche pendant longtemps. D’un autre côté, n’oublions pas que la production de ciment est une des industries qui émet le plus de gaz à effet de serre. Enfin, Jacques Boulnois aborda également l’urbanisme avec la nécessité de concevoir la ville en fonction de sa capacité à supporter des canicules, par exemple en évitant des quartiers où l’air ne circule pas et où la chaleur s’accumule dans la pierre.

Les oiseaux, témoins du changement, sauront-ils évoluer au bon rythme

Après un premier kilomètre de marche sur le bord du fleuve, quai Barentin, Christian Gauberville, biologiste et naturaliste, nous parla d’ornithologie. Pour l’instant, pas de disparition radicale de telle ou telle espèce d’oiseau. Mais les comportements des populations qui fréquentent notre pays ont changé. Les oiseaux migrateurs, notamment, semblent commencer à s’adapter au nouveau climat de nos régions.
Certains ont carrément renoncé à leur migration pour s’installer durablement en Europe, dans le sud de l’Angleterre. Mais il n’y a pas encore de certitude sur le lien entre le dérèglement climatique et ces nouveaux comportements. A l’avenir, ce qui est le plus à craindre, ce serait un déphasage de plus en plus grand entre les évolutions de comportement des oiseaux et les nouveaux modes de vie des insectes qu’ils mangent. Si les oiseaux restent dans la même aire de peuplement mais que les insectes dont il se nourrissent s’installent plus au Nord, les premiers risquent de ne plus pouvoir s’alimenter. Il vaudrait mieux que toutes les espèces s’adaptent aux nouveaux climats en même temps. Enfin, l’idéal serait que le réchauffement global soit le plus faible possible.

La Loire apporte moins d’eau à nos moulins

brochureAyant repris notre progression jusqu’à la capitainerie du port (sans commentaire sur son utilité réelle à Orléans), nous nous rassemblâmes face aux locaux de l’Etablissement public Loire (EPL). Quand on parle du climat dans notre région, il est difficile de ne pas s’interroger sur le devenir du fleuve. Thierry Soler nous présenta les résultats des recherches menées à ce sujet et dont l’EPL assume la mission de vulgarisation avec diverses brochures (ci-contre). La bonne nouvelle, c’est que rien ne permet de penser que le risque de crue centennale va augmenter si la planète se réchauffe. Nous aurons bien une crue majeure un jour où l’autre et il est important de s’y préparer et d’adapter nos activités et notre habitat à ce risque inévitable. Mais on ne pourra pas imputer ce genre d’événement au bouleversement climatique. En revanche, dans trois autres domaines majeurs, l’impact du dérèglement se fait parfois déjà sentir et nous menace plus directement. En ce qui concerne la température moyenne des cours d’eau du bassin de la Loire, elle a augmenté de près d’un degré au XXème siècle et l’on s’attend à ce que cela fasse en tout 2°C de plus en 2050. Cela peut avoir un impact non négligeable sur les cycles de reproduction des poissons et notamment les cyprinidae (carpes) qui se fient à la température pour les périodes de frai. Les poissons migrateurs pourraient également être victimes de ces modifications. D’autre part, le changement climatique affectera très nettement les débits d’étiages, c’est à dire les débits les plus faibles, en été, généralement maintenus à un minimum de 60 m3/s grâce aux barrages en amont. Mais quand ce seuil est impossible à tenir, le Préfet accorde une dérogation et l’on se retrouve avec des débits encore plus faibles. En 2015, les trois mois d’été ont quasiment tout le temps vu des débits autour de 50 m3/s avec un minimum à 38 m3/s en août. Le jour de notre balade, au milieu de l’automne, le débit de la Loire était encore de 63 m3/s seulement. Cela ne devrait pas s’arranger, selon les prévisions des chercheurs, et l’on doit sincèrement s’interroger sur les cultures irriguées dans notre région. Surtout, ce sont quatre centrales nucléaires qui dépendent du débit de la Loire pour leur refroidissement. Le fonctionnement normal de ces centrales est très problématique en dessous de 25m3/s car elles rejettent de l’eau chaude dans le fleuve. Enfin, si les journées ensoleillées deviennent plus nombreuses en été comme le prévoit Météo-France, les cours d’eau du bassin ligérien sont menacés d’eutrophysation, une forme d’asphyxie des rivières par les algues. Il semble que les efforts des dernières décennies pour limiter les phosphates rejetés en Loire aient évité ce phénomène mais l’augmentation de température de l’eau nous obligera à redoubler d’efforts.

La géothermie : renouvelable, disponible et trop discrète

centresciences

Il nous restait enfin quelques centaines de mètres à parcourir pour atteindre les locaux de Centre-Sciences, quai du Roi. Ce centre de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI) est une association très officiellement chargée de vulgariser les avancées de la recherche scientifique. Centre-Sciences propose des animations variées, des expositions pédagogiques et des événements marquants comme le passage du train du climat, le 15 octobre dernier, à Tours. Dans leur locaux datant de 2006, nous retrouvâmes l’architecte Jacques Boulnois qui a conçu les lieux dès cette époque avec l’objectif de minimiser la consommation d’énergie. Le directeur de Centre-Sciences, Olivier Morand, en assura la visite en insistant sur le choix de l’exemplarité fait par l’association et le partage des données relatives aux bâtiments afin de promouvoir l’innovation technologique et la géothermie. C’est en effet ce mode de chauffage qui a été retenu pour les 250m2 de bureaux et la salle d’exposition du CCSTI.
ressource geothermieJustement, la géothermie, Olivier Goyénèche, du BRGM, était là pour en parler. Il nous montra que cette ressource est sous-exploitée dans la région, malgré un panel de solutions adaptées à chaque usage. Les particuliers peuvent équiper leur domicile en toute simplicité grâce à une installation très basse énergie qui échange les calories avec le sol au moyen d’une pompe à chaleur. Pour des projets urbains plus importants, il est préférable de recourir à la géothermie basse énergie en puisant directement l’eau chaude de la nappe du Dogger qui se trouve à 1500 mètres de profondeur, là où règne une température constante de 55°C. Malheureusement, la géothermie souffre du fait qu’elle puise son énergie gratuite dans le sous-sol et qu’on ne la voit donc pas fonctionner, même là où elle est le plus efficace.

On se promène, on réfléchit, et on agit

Voilà comment nous avons pu aborder, en à peine 3km, de multiples aspects du dérèglement climatique et de l’adaptation de notre mode de vie dans le Loiret. Il ne s’agissait certainement pas de politique politicienne et, d’ailleurs, Europe Écologie les Verts est loin d’être la seule organisation qui se mobilise à l’occasion de la COP21. Tout près de nous, les initiatives se multiplient qui montrent que la société civile est prête pour ce que nous appelons la transition écologique, cette nécessaire adaptation de notre société aux évolutions que nous avons provoquées dans notre environnement. A tous les niveaux de responsabilités, les élus écologistes de notre parti relaient ces initiatives et proposent un cadre institutionnel qui favorise notre progression vers un mode de vie confortable et soutenable.