Réforme territoriale : et si on parlait de politiques publiques et pas de frontières ?

Tribune de Thierry Soler, Conseiller général du Loiret, Canton de Chécy

Le Président de la République vient de tracer plus précisément les contours de la réforme territoriale dont il fait désormais une priorité. Je ne crois pas que l’on puisse résoudre les problèmes des Français par un redécoupage administratif et je suis un peu effrayé de tous les commentateurs qui peuvent passer des heures à tracer et retracer les contours de la carte.

Je pense que l’on doit avant tout saluer un certain nombre d’innovations en phase avec la réalité du terrain, en particulier le renforcement de l’intercommunalité et son évolution vers plus de représentativité démocratique.

Cependant, la réforme institutionnelle qui s’impose vraiment concerne moins les modes de scrutins ou les frontières des régions que la répartition des compétences et des actions que peuvent mener les collectivités publiques dans l’intérêt général.

Bien sûr, la droite aigrie et revancharde préfère fantasmer sur les accouplements plus ou moins réussis entre régions. Pas que la droite, d’ailleurs, c’est bien regrettable. On devrait pourtant au moins se demander s’il faut agrandir ou non les régions mais le débat se résume à savoir si le Centre doit se marier au Sud, à l’Est, au Nord ou à l’Ouest. Et chacun a son point de vue sur la question, évidemment. C’est tellement plus facile que de réfléchir à l’action publique qu’il convient de mener puis de définir ensuite les structures administratives qui le feront le mieux.

Et justement, pour justifier ses choix territoriaux, le gouvernement s’enferme dans une logique fondée sur la seule compétitivité économique, une compétitivité reposant sur les mirages de l’attractivité ou du rayonnement des territoires.

De mon côté, il me semble que les solutions sont plutôt à rechercher dans le renforcement des solidarités locales pour mener une transition certes économique mais aussi sociale et environnementale. En plus, ce travail ne pourra être fait depuis le sommet. C’est avec la population qu’il convient de bâtir un projet renforçant à la fois la capacité des territoires à s’administrer de façon autonome (la décentralisation) et leurs interactions profitables à tous en fonction des réalités géopolitiques qui leur sont propres (égalité des territoires).

Je ne vois pas comment on peut décréter que l’assemblage de trois régions supposées moins compétitives va forcément conduire à un territoire plus fort. Souhaite-t-on des régions d’une taille propre à faciliter la vie des compétiteurs qui monopolisent le pouvoir et le bien-être ou cherche-t-on à développer des territoires qui apporteraient plus à partager pour l’ensemble de la population ?

Les habitants ont-ils besoins de nouvelles infrastructures ou de réduire les gaspillages d’énergie et de ressources naturelles ? A quelle échelle doit-on encadrer l’urbanisme ? Quelle est la taille optimale pour un réseau de transports en commun ? Voilà les questions qui devraient guider la réforme et pour cela être débattues collectivement avec tous les citoyens. En traçant des cantons et des régions nouvelles avant même d’y répondre, le gouvernement met la charrue avant les bœufs.

Article initialement paru sur le blog de Thierry Soler, Ensemble, agissons pour notre qualité de vie